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Date : 27 janvier 2020

De la cuisine en Vivaldie

Sans ambages, la cuisine en Vivaldie peut être qualifié d’élitiste. Les élites vivaldiennes rejettent en bloc la cuisine « du terroir » nommée avec mépris comme une « alimentation populaire ».
Importée du pouvoir impérial, puis royal, la cuisine des élites en Vivaldie est « hors-sol », c’est-à-dire qu’elle ne prend pas en considération les spécificités locales dans le cadre de l’élaboration des recettes. En ce sens, les élites préfèrent faire appel à des « maîtres cuisiniers », qui y mènent une vie itinérante et officient dans les plus grandes tables.

Ces cuisiniers exercent dans un domaine bien particulier, qu’ils ont le plus souvent créé de toutes pièces. Ainsi, le grand maître-cuisinier du « soupisme », régalera nos papilles avec ses soupes exclusives, qui feront à la fois le bonheur des élites et marqueront l’avantage et la position sociale de l’hôte du repas. Ce type de cuisine, créé à l’origine par le pouvoir politique pour marquer sa distance avec le bas peuple, passe petit à petit de la noblesse à la bourgeoisie. Le recul de pouvoir politique en Vivaldie associé à la faiblesse de la noblesse face au dynamisme des bourgeois, implique que cette cuisine est, dorénavant, plébiscitée par les bourgeois. Cela montre bien que cette classe sociale décide de plus en plus du destin de la Vivaldie.



La cuisine est, depuis longtemps, une discipline intimement liée au pouvoir et aux puissants en général. Ainsi dès la Rome antique, comme on peut le voir dans le recueil De Re coquinaria, écrit probablement au IVème siècle mais attribué au gastronome Apicius (Ier siècle). Apicius était connu pour être un homme d’une richesse extraordinaire, proche, dans sa jeunesse, de l’empereur, et qui n’hésitait pas à faire venir les mets les plus exquis des quatre coins de l’empire afin de garnir sa table. Sans surprise, les recettes du livre sont donc plutôt complexes, et impossible à réaliser pour les couches modestes.

Au Moyen Âge, les recettes de cuisines connues sont également réalisées par des classes sociales aisées. Ainsi, on peut citer Le Ménagier de Paris, écrit en 1393 par un bourgeois parisien, le Viandier de Taillevent, attribué à Guillaume Tirel, dit « Taillevent », cuisiner des rois Charles V et Charles VI au XIVème siècle, et Du fait de cuisine, rédigé en 1420 par Maître Chiquart, cuisinier du roi Amédée V de Savoie. De tous ces ouvrages, on remarque bien que la grande cuisine reste encore le fait du prince, mais si l’irruption du bourgeois sur la scène politique, sociétale et économique est fortement visible grâce au Ménagier.

Cependant, là encore, les couches modestes n’ont pas accès à la profusion des mets et des ingrédients retranscrits dans ces livres.


À l’époque moderne, les mets sont de plus en plus fins, et la séparation entre les tables princières et bourgeoises face aux tables « du terroir » se creuse. La découverte des Amériques et la mise en place du commerce mondial fait apparaître des nouveaux mets sur les tables aristocratiques, dont le prix interdit bien sûr la propagation à toutes les couches de la société. Ainsi la dinde, le chocolat, le café, le thé, la pomme de terre, la tomate, le haricot, la courge, la courgette, le maïs, le sucre et bien d’autres font leur apparition. Au XVIIème, siècle, les racines et les fruits cuisinés à toutes les sauces sont mis à l’honneur, comme le montre Le Cuisinier françois, receptaire publié en 1651 par François Pierre de la Varenne, cuisinier du marquis d’Uxelles et gouverneur de Chalons sur Saône.

Au XVIIIème, les mets se font encore plus fins alors que la crème chantilly, la mayonnaise ou encore le champagne font leur apparition. Nous noterons que la Révolution brisera le lien entre la table et les pouvoirs, alors que les chefs cuisiniers n’ont plus de maîtres (ils sont le plus souvent émigrés), et ouvrent des restaurants afin de subvenir à leurs besoins. Le triomphe de l’Europe monarchique en 1815 implique un retour d’une cuisine liée au pouvoir, et en particulier à la bourgeoisie.


La cuisine en Vivaldie s’inspire donc d’une constante que seule la Révolution aura su recouvrir faute de princes : la grande cuisine est liée aux puissants. En ce sens la grande cuisine vivaldienne sera donc l’apanage des nobles et de la bourgeoisie, alors que celle-ci perce et s’installe peu à peu dans le champ politique. De toutes les périodes précédemment citées, c’est donc le XIVème siècle français qui retient notre attention pour forger ce concept de cuisine élitaire.


Pour aller plus loin :

  • Apicius, De Re coquinaria, trad Anglaise : http://penelope.uchicago.edu/Thayer/E/Roman/Texts/Apicius/home.html
  • Baudet Jean, Histoire de la cuisine, Jourdan, Bruxelles, 2013
  • Le Cuisinier françois, préface de Mary et Philip Hyman, Orthez, Éditions Manucius, 2001.
  • Marcilhac Vincent, Le Luxe alimentaire. Une singularité française, PUR/PUFR, coll. « Tables des hommes », Rennes, 2013

Yoann
 
Découvrez Yoann, de l'équipe du Projet CarTylion. Il est historien et travaille à la création de l'univers d'ambiance médiévale fantastique de 3ème Aube.
Histoire
 

1 reply on “De la cuisine en Vivaldie”

    1. Salon de l’Agriculture 2020 – Blog Projet CarTylion

      […] C’est une source d’inspiration énorme pour la cuisine de 3ème Aube, bien sûr, c’est pour cela que j’y ai passé autant de temps, je recueillais l’inspiration ! […]
      – Article Salon de l’Agriculture 2020

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