René Fonck et Georges Guynemer, deux chevaliers du ciel radicalement différents
La guerre
Lorsque la Première Guerre Mondiale éclate, l’esprit chevaleresque des temps anciens a disparu depuis bien longtemps. Son souvenir semble encore s’éloigner à la vue de l’immondice innommable que furent les combats de la première des guerres modernes. Les tournois de chevaliers sous les yeux de la princesse et les duels à l’aube entre mousquetaires avaient laissé place à la froideur métallique de la mitraille et aux boucheries géantes dans les tranchées.
Des masses humaines immenses et informes s’entretuaient dans la boue et des pluies d’obus ravageaient les paysages. Les plaines et les forêts disparaissaient sur des kilomètres, jusqu’au dernier arbre, au dernier rocher, à la dernière racine, pour ne laisser qu’un océan noir de boue et de vase dont seuls les cadavres et les flaques de sang venaient troubler la morne homogénéité.
Les hommes pourrissaient dans les tranchées sous les bombes ou étaient jetés à la merci des balles lors de sorties qui ne pouvaient aboutir qu’à la mort. Des nuages immenses de gaz toxique trafiqués dans d’obscurs laboratoires étaient lâchés, souillant les airs et tuant leurs victimes dans un cauchemar de souffrances à peine imaginable, suite à quoi des soldats sans visage attaquaient, la face cachée par leurs masques à gaz, ressemblant à des hommes-machines venant d’un monde où l’humanité aurait disparu. On croyait assister à la fin du monde.
Il n’est bien évidemment pas question de nier l’horreur que pouvait être une mêlée médiévale telle qu’on en connut à Bouvines. Mais il est indéniable que les progrès de la science ont donné à la guerre une inhumanité jamais atteinte auparavant. Le progrès grandit l’Homme en temps de paix mais le barbarise en temps de guerre. Et pourtant, au milieu de ce marigot de laideur et de mort, est né un nouvel art de combat qui a redonné vie à l’idéal chevaleresque.
Les combats d’aviateurs
Il s’agit, vous l’avez deviné, du combat aérien. Beaucoup plus rares, les avions ne formaient pas de masses informes comme les soldats des armées terrestres. Haut dans le ciel, les affrontements aériens étaient visibles par tous, et pouvaient faire penser à des duels entre chevaliers, montés sur ce qui pouvait être assimilé à une version moderne des destriers d’antan.
Il faut alors imaginer les hommes restés au sol reconnaître le drapeau de leur pays sur l’un des avions, l’encourager en le voyant tournoyer autour d’un appareil marqué du drapeau ennemi, frémir à chaque balle qui semblait le toucher, exulter lorsqu’il semblait toucher son adversaire, hurler de joie lorsqu’il l’abattait.
Dans ce contexte, on se mit à compter officiellement les victoires des aviateurs. Un système de comptage fut mis en place, nécessitant plusieurs témoins au sol pour confirmer que l’avion ennemi avait bien été détruit. À partir de cinq victoires homologuées, on se voyait décerner le titre d’as de l’aviation. De nombreux pilotes y parvinrent, mais seule une poignée d’entre eux, les plus habiles et talentueux de tous, se hissèrent jusqu’au titre tant convoité d’as des as.
Les héros français
Les deux plus grands as français furent Georges Guynemer et René Fonck.
Le premier, Georges Guynemer, est issu d’un milieu aristocrate et s’illustre par d’épiques duels tournoyants d’où il sortait toujours vainqueur. Il est finalement tué au combat en 1917, après avoir atteint le score exceptionnel de 53 victoires. C’est certes en-dessous des meilleurs as allemands, comme le redoutable Manfred von Richthofen, dit le Baron Rouge, détenteur du record de la guerre avec 80 victoires, mais cela ne l’empêche pas d’être unanimement respecté jusque chez l’ennemi pour sa bravoure et son code d’honneur. Le numéro deux des as allemands, Ernst Udet (62 victoires), raconta notamment avoir été épargné par Guynemer lors d’un duel perdu contre lui où sa mitrailleuse s’était enrayée.
Notons cependant que le système de comptage français était le plus strict de tous les belligérants. De nombreuses victoires étaient refusées, en particulier quand l’adversaire s’écrasait en territoire ennemi, où il était impossible de trouver des témoins. Ainsi, 32 victoires furent refusées à René Fonck et 35 à Guynemer. Cela les placerait tous les deux devant le Baron Rouge, dont presque toutes les victoires furent accordées (80 sur 83 réclamées).
René Fonck, issu d’un milieu modeste, adoptera une méthode différente. Il ne s’engage que très rarement dans un duel frontal, préférant voler à haute altitude pour repérer les avions allemands de loin et fondre sur eux tel un aigle. Armé d’un sang-froid et d’un pragmatisme en acier trempé, il va se révéler d’une efficacité spectaculaire. Sa précision est telle qu’il lui arrive d’abattre des avions en seulement trois balles, évitant ainsi l’enrayement. Ses hauts faits se multiplient. Il abat les appareils ennemis à une vitesse phénoménale, parfois 6 en une journée, parfois 6 en moins de trois heures. À la bataille du Chemin des Dames, il est pris en chasse par cinq avions ennemis, et par une succession de manœuvres aériennes prodigieuses il parvient à esquiver toutes leurs balles et même à en abattre un. Il termine la guerre sans aucune blessure avec 75 victoires, le deuxième meilleur score après celui du Baron Rouge.
Les combats aériens ne sont évidemment pas les mêmes en 3ème Aube, mais nous pourrons aussi vous en narrer quand le temps sera venu. Et si vous aimez les personnages chevaleresques, n’hésitez pas à découvrir nos personnages du Projet CarTylion en fouillant notre site !
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